Je descends d’une lignée de cultivateurs. j'ai vécu toute mon enfance en milieu rural, souvent dehors, en contact permanent avec un environnement de forêts, de champs, de marais et la proximité de l'océan. J'y forgerai un tempérament contemplatif, libre, patient et autodidacte, à l'écoute des moindres détails qui m'entourent, avec un besoin permanent de comprendre. D'autre part, l'atelier et l'ambiance de l'exploitation agricole familiale me donneront le goût du "faire soi-même".

C'est dans cet état d'esprit que j'ai découvert la photographie, dans le laboratoire du collège. J'avais douze ans, et une image venait d’apparaître dans une cuvette de révélateur. Il me faudra encore quelques années pour comprendre que j'avais trouvé ma plume.

Par un aller simple vers la Guyane française et l'inconnu, pour que la timidité soit vaincue, j’ouvre mon esprit sur la multiplicité des cultures, liées aux espaces qui les façonnent. Ce séjour prolongé en terre lointaine sera aussi le voyage intérieur qui m'amènera vers plus d'humilité et d'humanisme.

En 2001, je perds l'usage de mon bras droit suite à un accident. La photographie est ma première grande victoire sur le handicap, grâce à la découverte d'un appareil photographique plus vieux que moi, mais que je peux manipuler d'une main. Il se laissera dompter en moins d'une heure, tandis qu'il me faudra plus de trois ans pour réapprendre à écrire avec un stylo.

Cet accident marque aussi mon retour sur ma terre natale. Le terme de cet exile m’ouvrira les yeux sur cette peur du sauvage qui nous déconnecte chaque jour un peu plus du vivant. C'est ce questionnement qui me porte vers chacune des mes photographies.